Note de do : L’ancien collaborateur de Nicolas Sarkozy est un suppôt de la droite morale, hostile au mariage homosexuel et à l’avortement. Il veut favoriser les riches en abolissant l’impôt sur la fortune, défavoriser les pauvres en augmentant la TVA, et augmenter l’exploitation de l’homme par l’homme en supprimant les 35 heures. Par ailleurs, il veut supprimer 500 000 fonctionnaires parce que les fonctionnaires votent à gauche.
François Fillon, la tentation conservatrice
https://www.letemps.ch/monde/2016/1…
Richard Werly, Paris
Publié lundi 21 novembre 2016 à 21:29
L’ancien premier ministre français, en tête avec 44% des voix, paraît programmé pour remporter les primaires de la droite. Sa campagne de terrain et son positionnement en faveur d’une alternance forte, mais sereine, lui ont permis de rafler la mise lors de ce scrutin à la fois populaire et rassurant
Ils n’avaient donc pas vu venir la vague. Ce lundi à Paris, commentateurs et sondeurs reconnaissaient en partie leur bévue. Trop d’importance accordée à l’énorme différentiel de voix, pour ces primaires inédites de la droite française. Trop de focalisation sur l’inépuisable énergie de Nicolas Sarkozy, lancé depuis septembre 2014 à la reconquête de la droite (lire en page 24). Comment imaginer qu’Alain Juppé, qui culminait en octobre à 42% des intentions de vote, puisse à ce point dévisser pour finir second derrière François Fillon, longtemps jugé trop terne ? « Il suffisait pourtant de regarder de plus près la liste des best-sellers corrige un éditeur parisien. Entre les succès phénoménaux d’Eric Zemmour ou Philippe de Villiers, et les tirages records des livres de Fillon ou Sarkozy, la France conservatrice est en ordre de marche. Elle privilégie les valeurs sûres. Cette primaire l’a confirmé ».
Vote de plus de 4 millions d’électeurs
La réussite de ce scrutin, copié sur la primaire du PS de 2011, n’était pourtant pas acquise. Jusqu’à dimanche, la Haute autorité (indépendante du parti Les Républicains) pariait sur trois millions d’électeurs, soit un peu plus que celle des socialistes. Or là aussi, erreur : plus de quatre millions se sont déplacés, confirmant le succès de cette compétition préprésidentielle, et aussi la soif de changement engendrée par le quinquennat Hollande. Explications du politologue Thomas Guénolé : « La campagne, puis les débats TV, ont transformé cet affrontement de personnalités en véritable compétition pour l’alternance à un moment où l’Elysée traverse une phase de discrédit sans précédent. C’est une excellente nouvelle pour la démocratie ».
François Fillon, vainqueur massif hier soir, n’est donc pas seulement le favori pour le second tour des primaires, dimanche prochain face à Alain Juppé (56% des intentions de vote). Il est d’ores et déjà en lice pour devenir le chef incontesté de la droite française, puis le favori de la présidentielle 2017 face à… Marine Le Pen, considérée comme la probable finaliste. « Pour l’heure, aucune enquête ne donne un candidat de gauche présent au second tour le 7 mai 2017. Cela peut changer bien sûr. Mais la pente à remonter est colossale » confirme Frédéric Dabi, directeur de l’IFOP, rendu prudent par ces primaires. La course pour l’Elysée pourrait dès lors se jouer à droite toute, à la fureur du candidat déclaré de la gauche radicale Jean-Luc Mélenchon : « Cette primaire sature l’espace médiatique explique son entourage. Comme si seuls les conservateurs et les libéraux pouvaient changer la France. C’est dramatique. »
N’empêche : la primaire de la droite brosse un bon portrait politique de la France. D’un côté, une gauche spectatrice, contrainte d’attendre l’annonce, début décembre, de la candidature ou non de François Hollande, avant d’organiser à son tour en janvier une primaire bien plus délicate : « Le parti socialiste n’occupe plus un espace politique suffisant pour que ce scrutin obtienne un succès similaire à celui de la droite note le politologue Gerard Grunberg, de l’agence Telos. Il est coupé de sa gauche par la rupture avec les autres formations de gauche et de sa droite avec l’autonomisation d’Emmanuel Macron. »
Droite dynamisée
De l’autre : une droite forte, dynamisée par la mobilisation électorale de cette fin novembre, par l’absence de contestation des résultats (malgré la déception des petits candidats laminés) et par le ralliement très rapide aux finalistes des battus : « Fillon a employé à dessein dans son discours de dimanche soir les mots « sillon », « alternance tranquille », « projet puissant » commente un proche. Il a compris que la France conservatrice a relevé la tête et que le plafond de verre existe encore pour le FN. Beaucoup d’électeurs de droite jugent que le Front national dit des choses vraies, qu’il peut être élu localement, mais qu’il serait un danger à la tête du pays et de l’économie. En ce sens, l’appel de Sarkozy à ne pas voter pour les extrêmes tombe à plat. Cette droite-là ne veut pas de Marine présidente ».
Reste à savoir, pour François Fillon, 62 ans, comment parvenir à la victoire finale. Ce qui pose la question de son attitude entre les deux tours, dont son premier meeting à Lyon, mardi soir, donnera la tonalité. Cherchera-t-il à rassembler les centristes (alliés d’Alain Juppé) alors que François Bayrou a promis hier au Figaro de « faire mûrir un projet » ? Va-t-il au contraire réaffirmer sa volonté d’une politique économique de l’offre, réitérer sa promesse d’abolir l’impôt sur la fortune et les 35 heures de travail hebdomadaires, laisser planer le doute sur la remise en cause du mariage homosexuel ? On voit aussi combien son engagement pour les Chrétiens d’orient, sa volonté de réaligner la politique étrangère française sur la Russie – qu’il avait affirmé le 19 mai au Forum des 100 de l’Hebdo à Lausanne – ou ses prises de position souverainistes (et jadis anti-Maastricht et anti-euro) sont des armes de campagne à double tranchant.
« La logique de la Ve République, une fois franchi le second tour des primaires, est la rencontre entre un homme et le peuple » nous expliquait récemment l’universitaire Pascal Perrineau. Au conservateur François Fillon, s’il veut remporter la primaire dimanche prochain, de dresser au plus vite les contours de « sa » France…
Le Pen, Hollande, Macron… Les jeux se compliquent
Une qualification de François Fillon dimanche prochain changerait la donne présidentielle
Marine Le Pen l’a toujours dit. Elle affrontera « le candidat que les Français désigneront ». La patronne du Front national, donnée finaliste de la présidentielle 2017 par les sondages, préfère par conséquent attendre, et fourbir ses armes contre un François Fillon qui, elle le sait, chasse sur la frange catholique, traditionaliste, souverainiste et pro-russe de son électorat.
Le profil d’Alain Juppé, plus rassembleur, était jusque-là le plus redouté par l’extrême droite. Tandis que Nicolas Sarkozy était présumé le plus vulnérable. L’angle d’attaque anti-Fillon, si ce dernier se qualifie dimanche ? L’économie. Le FN est étatiste, social, anti-libéral : « Qui va protéger les Français si on démantèle les services publics ? interroge Florian Philippot, vice-président du FN. Fillon, c’est l’échec de Sarko, plus l’assurance d’une nouvelle crise. »
A l’autre bout du spectre politique, l’Elysée et Matignon font leurs calculs. On sait que François Hollande devrait s’exprimer sur sa candidature en décembre, et que le premier ministre Manuel Valls trépigne. Alors ? « Fillon a l’avantage de la clarté. Ce sera un vrai duel droite-gauche au premier tour », expliquait lundi à France Info le politologue Patrick Lafarge. Mais plus question, en revanche, du « Tout sauf Sarkozy » dans lequel l’actuel chef de l’État pouvait espérer se draper.
On voit, à gauche, se profiler la stratégie : diaboliser l’ancien premier ministre comme un suppôt de la droite morale, hostile au mariage homosexuel et à l’avortement. Et semer l’effroi parmi les fonctionnaires. Sauf que le chômage massif, qui s’est aggravé durant le quinquennat, pèse bien plus lourd : « Fillon est solide. Il n’est pas perçu comme un casseur social », reconnaissait en septembre Alain Bergougnoux, l’un des experts du PS.
Restent les deux candidats-mousquetaires de gauche, très différents dans leur positionnement : Emmanuel Macron et Arnaud Montebourg. Le premier, qui refuse de participer à la primaire du PS prévue en janvier, dispose de l’espace que lui donne sa jeunesse, son option centriste et son rejet des sortants. Le second, qui rêve surtout de battre François Hollande, va abattre les cartes du protectionnisme et des nationalisations. En attente d’autres secousses du « séisme » Fillon…
(R. W.)