Source : un commentaire sous un article de Libération :
http://www.liberation.fr/monde/0102…
Mikati est un candidat de consensus suite à un compromis entre la FRANCE et le QATAR
C’est impressionnant le nombre de raccourcis dans les médias français depuis hier. Je suis français et je vis au Liban depuis plusieurs années. Je peux parler en connaissance de cause. Je n’ai aucun parti pris dans ce que je vais dire. Mais il faut replacer certaines choses :
1) Monsieur Hariri a payé le vol de 11 milliards de dollars des caisses de l’Etat Libanais, il a payé le fait de vouloir naturaliser 700 milles palestiniens de rite sunnite, ce qui aurait changé la démographie du Liban et écrasé chrétiens et chiites au pays du cèdre.
2) Mikati a été élu par 68 députés Libanais qui sont chrétiens, druzes, chiites et sunnites. C’est plus de la majorité des députes or le hezb et ses alliés ne sont pas majoritaires dans l’assemblée. Mikati est un candidat de consensus suite à un compromis entre la FRANCE et le QATAR. Compromis accepté par la Syrie et l’opposition libanaise qui avait démissionné du gouvernement Hariri. Donc pour être précis Mikati est le candidat de la France et du QATAR.
3)M.Hariri doit comprendre que le poste de premier ministre n’est pas un héritage que son pere lui a légué.Le Liban n’est pas encore un empire. Au Liban le premier ministre doit etre sunnite et il faut savoir Hariri n’est pas le seul sunnite du Liban. Ce fauteuil n’est pas un bien personnel.
4) Il faudrait une analyse un plus concise de la situation. Si vous voulez que le Liban soit une démocratie, il faut respecter le choix démocratique. Ce que les partisans de Hariri ne font visiblement pas en arguant un coup d’Etat.
La nomination de Nagib Mikati comme nouveau premier ministre étant chose faite, il est aujourd’hui nécessaire de définir le moyen de juger l’action de l’Homme et du gouvernement qu’il formera.
A priori, en raison du compromis franco-qatariote sur cette nomination, compromis accepté par Damas et par l’opposition, il ne s’agira ni d’un gouvernement de la nouvelle majorité au Parlement, donc contraire à la notion de prise par le pouvoir par le Hezbollah, ni d’un gouvernement de la nouvelle opposition comme bien entendu. Il s’agira, à priori, d’un gouvernement de technocrates – chose que confirme aujourd’hui Nabih Berri – avec de nouvelles figures politiques comme ce qu’a constitué Nagib Mikati lors de son premier cabinet gouvernemental qui a duré 3 mois et qui su gérer et le retrait syrien et l’organisation des élections législatives. On peut même rêver à une « dream team » gouvernementale avec des personnalités en dehors des sphères politiques habituelles, Ziad Baroud maintenu à l’intérieur, voir nommé comme il l’a toujours désiré en raison de sa formation de base, à la Justice, Demenios Kattar ou le retour de George Corm au ministère des finances, Ghassan Salamé quelque peu silencieux dernièrement au ministère des Affaires Etrangères, etc…
Pour rappel, le compromis franco-qatariote consiste à une mission simple, sauver le Tribunal International concernant l’Affaire Hariri, discrédité par la présence même du fils de Rafic Hariri à la tête de l’ancien gouvernement, lui-même accusé d’être impliqué dans les affaires des faux témoins. Des sondages conduits par des insitutions américaines et dont on ne parle que peu dans la presse libanaise malheureusement, indiquent en effet, ce qui n’est pas une surprise en soit, que 85% des personnes appartenant à la communauté chiite, trouvent le tribunal international partial, mais plus surprenant que 55% des chrétiens trouvent le tribunal partial, 43% nuancent et trouvent le tribunal « quelque peu impartial » et seul le solde trouve le tribunal international impartial. Sans surprise, 94% des personnes de la communauté sunnite trouvent le tribunal impartial. C’est devant ces symptômes du discrédit de l’institution internationale, discrédit accentué depuis par la diffusion d’enregistrements par la chaine Al Jadeed, prouvant son implication directe dans cette affaire, que le gouvernement Saad Hariri a été renversé. Il ne pouvait plus être impartial, il ne pouvait plus jouer le rôle de juge et d’arbitre et il fallait trouver un nouvel arbitre, en l’occurrence, la personne la mieux placée était Nagib Mikati.
Ceci étant dit pour replacer le contexte à venir du prochain gouvernement, quelles seront ses missions principales ?
La mission générale
Le tribunal international largement discrédité aujourd’hui comme le prouve le sondage publié par la revue « Foreign Policy » sera sa principale mission. Il s’agira de redonner la confiance des libanais, plus généralement, dans le système judiciaire, et en particulier vis-à-vis de cette institution et en cela la mise en place, au ministère de la justice, d’un technocrate, situé en dehors des divisions politiques sera particulièrement à examiner. Il faudra donc nécessairement abordé la question des faux témoins que Saad Hariri a refusé d’examiner, il faudra faire le jour sur tous les volets de l’affaire et non réclamer une vérité de complaisance.
Sur le volet politique
L’attachement au renforcements des institutions de l’État, à savoir la nomination de nouveaux cadres en dehors du cadre confessionnel habituel et l’émergence de nouveaux dirigeants technocrates qui seront le fer de lance dans cette lutte, il faudra sortir un jour ou l’autre, de la logique sectaire habituelle.
Sur le volet sécuritaire
La première menace est externe et non interne comme ce qu’on peut entendre dans une certaine presse, le Liban faisant face à 2 voisins plus ou moins belliqueux, à savoir la Syrie qui n’a jamais voulu délimité ses frontières et Israël qui vole quotidiennement l’espace aérien libanais, qui menace d’une manière hebdomadaire d’un conflit armé et qui aujourd’hui veut s’accaparer une partie du territoire maritime en raison de la présence de gisements énergétiques. Il faudra donc examiner qui seront les détenteurs des ministères de la défense et de l’énergie, la défense allant à priori au candidat de la Présidence de la République. Il est cependant à craindre que, comme le passé nous a prouvé, le Liban ne pourra donc pas s’armer pour défendre son espace aérien ou maritime, les pays occidentaux, les USA en tête refusant de nous fournir dans des armes défensives sous le prétexte fallacieux qu’elles pourraient tombées dans les mains sur Hezbollah, chose pourtant impossible comme le démontre la tenue des inventaires de l’armée libanaise, y compris durant la guerre civile.
Sur le volet sécuritaire interne, il y aura 2 dossiers à gérer, le Hezbollah et les camps armés palestiniens dont le désarmement à l’extérieur de la superficie des camps a été approuvé par le Dialogue National, mais les gouvernements Saniora puis Hariri ne sont pas passés aux actes en désarmant ses derniers. Le fait que face aux 2 menaces externes, il y ait l’alternative de l’Armée Libanaise force sera, sans nul toute, la meilleure réponse au Hezbollah et aux mouvements armés palestiniens et aux éléments intégristes sunnites, chose pour lesquelles malheureusement, comme mentionnée auparavant, les pays occidentaux refuseront. De ce fait, il faudra voir si Mikati sera capable de pouvoir y procéder. En ce qui concerne le Hezbollah, il n’a pas intérêt de bouger, Nagib Mikati étant un candidat de compromis, tout « mouvement armé » pourrait être fatal à son gouvernement. Si toutefois, « il bouge », il faudra alors examiner l’attitude du nouveau premier ministre.
Sur le volet économique
Hier soir, a été diffusée la première interview de Nagib Mikati qui indique vouloir s’attaquer à l’exil forcé des jeunes qui font face aux problèmes socio-économiques évidents. Il déplorait la perte « intellectuelle » de ce qui constitue notre know-how au profit de pays étrangers dont les pays du Golfe. A priori donc, la première mission du gouvernement Mikati serait donc économique.
Quelles sont les mesures concrètes que pourrait prendre ce gouvernement ? La hausse simple des salaires n’est pas suffisante puisqu’elle sera réduite par l’inflation mais il est évident qu’il faut d’un coté créer et attirer des emplois à valeur rajoutée et de l’autre coté, augmenter le pouvoir d’achat. Créer et attirer des emplois à forte valeur rajoutée n’est pas si évident déjà en raison de « notre environnement avec des voisins qui ne nous veulent que du bien » comme Israël et la Syrie, et en raison de notre environnement interne et sécuritaire et politique, instable par nature. Il faudra donc faire de grandes concessions, jugulant les risques, vis à vis de multinationales, concessions notamment d’ordre pécuniaires. Lutter contre l’inflation est plus facile en soit, il s’agira, non plus de mener une politique monétaire au sens strict, mais de prendre des mesures économiques réintroduisant les notions libérales de compétition face à une situation actuelle qu’on peut décrire comme étant celle des monopoles des agences exclusives.
Cela constituera, vraisemblablement, la base, faute de juger les actes à venir, pour noter l’action du gouvernement à venir, ce à quoi en fin de compte, ce blog s’attachera, dans son opposition habituelle depuis 2005 « aux esprits bien pensants ».
Mercredi 26 janvier à 10h07