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La croisade contre les fumeurs

jeudi 13 décembre 2012, par anonyme (Date de rédaction antérieure : 18 juillet 2009).

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Après avoir été imposé par des conditionnements pavloviens durant les années 50, le tabac est devenu aujourd’hui la cible d’une campagne hygiéniste qui veut le bannir de l’espace public si ce n’est du monde. Après avoir été manipulé par les fabricants de cigarette, ne sommes-nous pas en train d’être manipulé par les ministères de santé ?

La cigarette a joui pendant des décennies, à la faveur de la publicité, d’une image positive. Les fabricants ont façonné l’image du fumeur viril, du cow-boy solitaire. Son succès résulte pour une grande part d’une stratégie globale de l’industrie du tabac qui s’est adressée sournoisement aux jeunes et aux femmes afin d’exploiter ce nouveau public prometteur. La cigarette était supposée donner de la contenance et traduire la volonté d’émancipation de ces catégories vulnérables.

En conformité avec la convention-cadre de l’OMS, de nombreux pays ont promulgué ces dernières années une législation qui limite la publicité en faveur du tabac, fixe un âge légal pour acheter du tabac et règlemente les endroits où il est interdit de fumer. La législation met à l’index le fumeur en tant que corrupteur de l’air et transmetteur de mort. Est-ce la solution que de culpabiliser sans discernement les fumeurs ? Tous les conflits peuvent-ils être arbitrés par des mesures législatives ?

Cette législation est tendancieuse à divers titres. La pédagogie est certainement plus efficace que la répression : pour que cela soit efficace, le fumeur doit vouloir arrêter en son for intérieur et non pour se conformer à des principes extérieurs. L’assuétude ne se règle pas par diktat mais plutôt par l’information, la volonté individuelle et un accompagnement approprié. Lorsque la nocivité du tabac sera intériorisée, on peut tabler sur une chute significative de sa consommation. Le tabac n’est certes pas sain pour le corps mais l’hygiénisme ne l’est pas davantage pour la société. Imposer des interdits ne fait qu’augmenter la frustration et nuit gravement à la convivialité.

De plus, les législations à l’encontre du tabagisme se caractérisent par un manque de discernement. Les lois prohibitionnistes ne font aucune distinction entre le cigare et les cigarettes alors que les approches sont radicalement divergentes. Le cigare est une passion épicurienne assumée cependant que la cigarette est très souvent un acte compulsif subi. Le cigare est un plaisir choisi en connaissance de cause comme le vin ou le whisky. C’est une volupté partagée qui crée des liens sociaux.

On réédite mutatis mutandis les erreurs de la prohibition à l’encontre de l’alcool dans les années 20. Certes on peut encore fumer à l’air libre, sur les terrasses ou chez soi mais pour combien de temps encore ! On se dirige inexorablement à terme vers l’interdiction absolue. Ce qui fait question, c’est la remise en cause du sens de la responsabilité et de la liberté individuelle. La législation relative au tabac a un écho paternaliste : on suppose que les individus ne sont pas aptes à prendre soin d’eux-mêmes et de leurs proches. De même que l’on prend sa voiture tous les jours malgré le danger lié aux accidents de la route, ont peut choisir de fumer tout en assumant les risques.

La société contemporaine est de plus en plus normative ; on a entamé une spirale de restriction des libertés individuelles au nom de principes spécieux : santé publiques, sécurité publique. Ces mesures restrictives, en développant une tension anxiogène, visent à assurer un meilleur contrôle social. Tout le monde s’accoutume passivement à se voir retrancher des monceaux de liberté d’action et de mouvement. Il conviendrait d’abord de délimiter le dol commercial et d’imposer plus de transparence ainsi qu’une réglementation plus stricte aux fabricants de tabac qui injectent des dizaines de produits toxiques aux cigarettes.

Le tabac est devenu la cause explicative par défaut de l’augmentation des cancers. Il est devenu aisé de l’accuser en tout état de cause et de disculper par la même occasion l’environnement de l’homme moderne : le cadre de travail, le stress lié à la frénésie et l’insécurité récurrente de la vie postmoderne, les ondes électromagnétiques, le voisinage d’une zone industrielle, les matériaux chimiques de toute sorte, les rejets de gaz carbonique, … Le tabac fait reposer la responsabilité principalement sur le fumeur : on ne peut s’en prendre qu’à soi-même si l’on tombe malade. Les autorités publiques et les industries se voient dédouanées et exemptées de payer des indemnités pour les malades du cancer. Cherche-t-on vraiment à protéger les fumeurs et les non-fumeurs ou vise-t-on à protéger les industriels ?

L’argument central des prohibitionnistes consiste à mettre l’accent sur le tabagisme passif. Les fumeurs porteraient atteinte non seulement à leur santé mais surtout à la santé de leur entourage. On les présente quasi comme des tueurs en série. En fait, cette causalité qui passe pour une évidence n’est pas scientifiquement avérée. A l’heure actuelle, on ne peut affirmer avec certitude que l’exposition à la fumée secondaire comporte un risque de cancer du poumon. Les résultats de l’étude du CIRC (centre international de recherche sur le cancer) de l’OMS ne sont pas en mesure d’établir une corrélation directe entre l’exposition à la fumée de tabac dans l’air ambiant et le cancer du poumon chez les non-fumeurs. D’après William Blot et Joseph K. McLaughlin, experts de l’épidémiologie du tabac, l’exposition environnementale à la fumée du tabac est selon toute vraisemblance un cancérigène pulmonaire de faible intensité. Qui plus est, l’approche statistique ne tient aucunement compte de la globalité et de la complexité des choses : aspect social, culturel, psychologique, etc.

Quoi qu’il en soit, il n’y aucune raison valable pour interdire l’existence des espaces fumoirs – avec les précautions d’usage pour la protection du personnel- dotés d’un système d’aération ad hoc. Pourtant, ces espaces sont déjà interdits dans nombres de pays. Nous plaidons pour que la législation soit corrigée et qu’il y ait des lieux non-fumeurs et des lieux fumeurs afin que chacun conserve un espace de liberté.

De : Emrah KAYNAK

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