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LE NOUVEAU GOUVERNEMENT A L’EPREUVE DE L’ENSEIGNEMENT ET DU CHOMAGE (*)

mardi 21 février 2012, par anonyme (Date de rédaction antérieure : 21 février 2012).

LE NOUVEAU GOUVERNEMENT A L’EPREUVE DE L’ENSEIGNEMENT ET DU CHOMAGE (*) Par Bensalem HIMMICH Ex-ministre de la Culture

• Ce drame de l’Enseignement qui hypothèque le futur ! • Le chômage : une plaie grande ouverte pour des jeunes en panne d’avenir.

Le Gouvernement Benkirane arrive aux débuts d’un mouvement social inédit, qui n’est pas que la réplique du « printemps arabe », mais la résultante de refoulements et malaises accumulés, qui ont fait naître des générations majoritairement frustrées et en panne d’avenir . Droit au travail Ce hirâk pourra gagner en bouillonnement et en force si le nouveau gouvernement ne s’attelle pas sérieusement au traitement, même progressif, de ses revendications, en tête desquelles se trouve le droit à la vie digne dont la clef de voûte est le droit au travail (comme le stipulent les articles 20 et 30 de la nouvelle Constitution). Car « la crise du chômage, avertit le dernier rapport du CES, constitue une menace contre la cohésion sociale. » Cependant, le nœud du drame de l’emploi, notamment des diplômés, réside dans le fait que ces derniers sont, en général, des lauréats d’un Enseignement public qui, depuis plus de trois décennies, s’est affaibli et dégradé ; il décerne de plus en plus des diplômes qui, au fil des années, ont perdu de leur valeur sur le marché du travail et de l’emploi. La situation de notre Université, presque toutes disciplines confondues, donne une image poignante du regrettable état des lieux qui empire avec le temps. Y ont contribué, même inégalement, les ministères de tutelle successifs, des cadres enseignants cyniques et/ou incompétents et aussi les étudiants arrivistes, friands de diplômes au rabais. Il en résulte que nous sommes maintenant devant un problème complexe, épineux, aux conséquences et retombées gravissimes : le secteur privé refuse d’embaucher les lauréats (même titulaires de diplômes supérieurs qu’ il juge objectivement inemployables) ; ces derniers, à leur tour, rechignent à travailler dans ce secteur non sécurisant, selon eux ; la fonction publique saturée ne peut, financièrement parlant, intégrer leurs promotions successives, de plus en plus nombreuses ; alors que celles-ci n’aspirent massivement qu’à cette intégration, plus sûre et rassurante à leurs yeux. Pour briser ce cercle vicieux ou même l’atténuer, rien n’y fait. Ni la commission Nationale de l’Enseignement (1995), ni la Charte de l’ Enseignement qui s’en est suivie, ni plus récemment le Programme d’urgence… Problème complexe et épineux avons-nous dit, que des rapports et études nous aident à en connaître les causes et les agents pathogènes, lesquels, s’ils s’aggravaient risqueraient de menacer l’avenir du pays de précarité et d’entropie et de mettre le Maroc de demain à la merci de cadres inaptes et malformés. Ce qui pourrait accentuer la fuite des compétences à l’étranger ainsi que la mainmise du secteur privé sur celles dont il a besoin, et ne recrutant parmi les lauréats de l’Enseignement public que sporadiquement, à dose homéopathique et presque par charité civique . Les propositions de remèdes prônant la professionnalisation de l’Enseignement et l’orientation des élèves et étudiants vers les centres et écoles y afférents ne sont que des pis-aller, à effets limités, puisque le chômage touche aussi les lauréats de ces centres et écoles et que les finalités de l’Enseignement à travers tous ses cycles -outre la formation aux métiers - sont principalement la promotion d’une société du savoir et de la recherche fondamentale,créatrice de cadres et d’élites du développement global et durable. Au service de ces finalités et en témoignage de leur importance vitale, un budget de 51 milliards de dh fut affecté au secteur de l’Enseignement dans la loi de finance 2011, soit 29% du budget général de l’Etat et 6% du PIB, dépassant celui de la défense nationale, sans parler de ceux des autres secteurs ministériels. Quant au discours apaisant sur le chômage comme phénomène mondial, il est inopérant et réfutable, car il se décharge de toute méditation des solutions pratiques et des initiatives préventives adoptées de par le monde ainsi que de toute recherche à s’en inspirer utilement, même à titre expérimental et transitoire (Feu François Mitterand disait : « Pour le problème de chômage, nous avons tout essayé. » ) Pour ne pas multiplier les exemples, arrêtons- nous à un seul, très proche de nous au plan historique et relationnel, c’est celui de la France de la cinquième République qui, à l’instigation de son fondateur Ch. de Gaulle, a crée en 1958 un régime d’assurance chômage, auquel en 1988, sous le gouvernement de Michel Rocard, est venu s’ajouter le Revenu Minimum d’Insertion (RMI), et auquel on a substitué en 2009 le Revenu de Solidarité Active (RSA). Ce genre de solutions, entourées de précautions et de conditions, est ce qui nous semble aujourd’hui le plus à même d’être médité et mis en œuvre. Un fonds d’allocation chômage serait le bienvenu et dont la fonction est d’indemniser d’ une part ceux qui ont perdu leur emploi et de mettre à niveau, d’autre part, la formation des diplômés chômeurs de moyenne ou longue durée ; fonds qui pourrait être financé, comme le prévoit le programme de l’actuel gouvernement, par une Caisse de solidarité sociale ou toute autre Caisse ad-hoc. Cependant, elle nous semble a priori plus qu’ aléatoire et aux résultats incertains la promesse de ce même programme d’offrir à 50.000 chômeurs de longue durée un stage de recyclage d’une année, moyennant des bourses mensuelles dont ni le montant ni la source ne sont déclinées. Mais pour ne préjuger de rien, attendons le temps qu’il faut pour voir les résultats et les évaluer. Quant à l’auto-emploi prôné par ledit programme, lorsqu’ on voit ce qu’est devenue Mouqawalati à travers son pénible historique, il y a de quoi être dubitatif et perplexe quant au sort d’autres PME qui peinent avec leurs créanciers comme à s’inscrire dans une durée productive et prometteuse. Réformer en amont : Par conséquent, c’est en amont que les mésures-phares doivent être prises, comme l’augmentation des parts d’investissement et l’intensification des efforts de réforme au profit de l’Enseignement en général et de l’Enseignement fondamental en particulier : amélioration des salaires, des primes et des promotions ; déploiement de mécanismes de compétition pour l’émergence d’écoles et de collèges modèles ; remembrement des unités d’enseignement dans le monde rural à travers une infrastructure routière facilitant le transport ; création de cantines avec l’appui de l’INDH et d’autres partenaires, etc. Ces mesures réformatrices, entre autres, de l’Enseignement fondamental (sur lesquelles devaient porter et insister le programme de l’Exécutif) sont susceptibles de le rénover et de le rendre apte, dans le moyen et long termes, à régénérer tout le système d’Enseignement, en renforçant ses rapports et passerelles avec le marché de l’entreprise et de l’emploi et en l’ouvrant à la modernité, aux valeurs éthiques et à la culture. La politique de l’Enseignement est donc une question centrifuge, cruciale, comme le reconnaît bien la déclaration gouvernementale. C’est parce que liée organiquement au problème du chômage et seule garante d’un avenir meilleur qu’elle a grandement besoin d’une réforme radicale, à même de renforcer son tissu pédagogique et culturel et d’améliorer son rendement en termes de formation de compétences aguerries et de création continue d’emplois. C’est donc sur le terrain Enseignement -Chômage, en premier lieu, que la nouvelle équipe gouvernementale, pilotée par le PJD, est attendue de pied ferme, non seulement par les partis de l’opposition, mais aussi par l’électorat de ladite équipe, les sans-emplois qui sont légion et tous les nécessiteux et laissées -pour- compte dans notre pays.

(*) L’ECONOMISTE, le 08/02/2012.

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