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Pour une écologie ANTI-IMPÉRIALISTE (Ginette Hess Skandrani 2009)

dimanche 24 juin 2012

Lorsque nous avons crée le Mouvement d’écologie politique, dans les années 1978/1980, nous voulions nous démarquer de tous les partis politiques hexagonaux qui étaient tous productivistes et prônaient le bien-être par la croissance économique et la production industrielle sans prendre en compte la destruction de l’environnement, les pollutions générées, la diversité des populations habitants la planète, l’arrêt du pillage des ressources, la vie des autres espèces vivantes ni l ‘héritage à laisser aux générations futures.

L’écologie Politique

En Alsace, la section du Mouvement d’Ecologie politique (MEP) s’appelait Ecologie et survie. J’ai beaucoup fréquenté les militants du MEP au moment des luttes antinucléaires. Nombre d’entre eux étaient issus des luttes environnementales ou naturalistes ou de défense des animaux. Lorsque je les ai rejoint, le lendemain de l’élection de François Mitterrand, qui avait manipulé les mouvements antinucléaires pour se faire élire en leur promettant l’arrêt du tout nucléaire s’ils votaient pour lui, je pensais faire de la politique autrement… Je me suis vite rendu compte que je n’étais pas tout à fait à ma place dans ce mouvement. J’étais en plein accord avec leurs analyses sur la préservation de l’environnement, la critique du productivisme, la remise en question de la société de consommation et de la marchandisation de la société ainsi que la contestation de l’énergie nucléaire. Mais j’étais trop engagée dans les luttes anti-coloniales, antisionistes, anti-guerres et de solidarité avec les immigrés pour ne pas intervenir sur tous ces sujets. Toutes ces luttes dérangeaient souvent les écologistes qui se référaient à la non-violence et ne soutenaient jamais les mouvements de résistance armée ou trop revendicatifs ou tout simplement des luttes menées par la gauche et l’extrême gauche…

J’ai toujours estimé que toutes ces luttes devaient être reconnues comme parties intégrantes du projet écologiste et portées par les écologistes.

Lorsqu’on me disait que l’idéologie écologiste se définissait par : "Comment habiter ensemble cette planète, sans exclusion et en partageant égalitairement ses ressources et ses savoirs", pour moi, cela voulait dire d’autres relations nord-sud fondées sur le partage et des solidarités réelles avec les exclus d’ici et d’ailleurs. Car un véritable projet de société écologiste devait remettre en question cette civilisation occidentale arrogante et responsable du génocide amérindien de la déportation et de la mise en esclavage des noirs d’Afrique, du colonialisme, du pillage des ressources de la planète, d’Hiroshima et de Nagasaki, des guerres de conquêtes etc.

J’étais persuadée, et je le suis toujours, que lutter pour une société écologiste, donc plus juste et plus transnationale était : lutter contre la domination de l’homme sur l’homme, contre la domination de l’homme sur la nature et contre la domination de l’homme sur les autres espèces vivantes.

J’ai mis beaucoup de temps à faire passer mes idées, que certains militants considéraient comme des idées de gauchiste. Ils ne comprenaient pas que ces idées étaient universelles et qu’elles appartenaient à tout le monde. J’ai toujours été considérée comme un phénomène dans ce mouvement qui est devenu au fil des années beaucoup trop électoraliste, alors que je n’ai jamais cru que l’on pouvait changer la société à travers les urnes. J’ai pourtant essayé de comprendre le système électoral. Je me suis présentée à quelques élections, cantonales, municipales, législatives, européennes. Mais je n’ai jamais été à l’aise dans la constitution des listes car je ne supportais pas la façon dont des militants, qui prétendaient défendre les mêmes causes, étaient capables de s’étriper et de se vendre pour une place d’éligible. Ils avaient tous oubliés que nous avions décidé de nous présenter aux élections afin de faire passer nos idées. Les idées devenaient moins importantes que la compétition et la course aux places.

J’ai préféré continuer mes relations avec le Monde Arabe et particulièrement avec la Palestine et l’Afrique et les nombreuses associations, issues de ces endroits et défendre ceux qui les représentent ici : immigrés, sans-papiers, exilés etc… plutôt que de courir après des postes.

La place de l’écologie dans la société d’aujourd’hui

Que les écologistes se placent à gauche, à droite ou au centre n’est pas le vrai problème, puisque l’écologie étant un mouvement universel, n‘a pas besoin de cases ni d’étagères. Mais le fait qu’ils se placent dans l’économie libérale, donc capitaliste, prônant le productivisme et la croissance économique et financière, responsables de la destruction de l’environnement, du dérèglement climatique et de la misère des pays du Sud… est très grave et remet tous les principes pour lesquels se sont battus de nombreux écologistes dont en premier René Dumont.

Daniel Cohn Bendit et ses acolytes d’Europe écologie ont tué l’esprit écolo qui voulait changer le monde afin de pouvoir l’habiter tous ensemble, de Nord au Sud, d’Est en Ouest, en partageant équitablement les ressources et les savoirs, en respectant les autres espèces vivantes et en laissant une planète vivable pour les générations futures… Tout cela me semble impossible à réaliser dans une société capitaliste fondée sur la compétition et qui favorise le profit de ses élites tout en laissant une grande partie de l’humanité sur le carreau.

A l’heure du réchauffement de la planète, de la destruction de notre environnement et de la biodiversité, de la pollution de l’air, des eaux et des terres, de la fin de certaines énergies, il faudrait remettre en question notre mode de vie, notre course à la croissance au lieu de mentir aux électeurs en leur faisant croire que la planète pourra encore supporter longtemps tous ces dérèglements et continuer à assurer le bien-être à certains tout en laissant crever les autres.

Un mouvement écologiste ne peut être qu’anticolonialiste et donc antisioniste.

Le slogan « le droit des peuples a disposer d’eux-mêmes » a été un des premiers slogans repris à la constitution des verts et c’est au nom de ce slogan que nous avons soutenu les Kanaks, les Polynésiens les Irakiens,les Amérindiens, les Afghans et autres peuples colonisés. Mais dès qu’il s’agissait de soutenir les Palestiniens dans leur juste lutte de récupération de leurs terres volées par des Européens, nous trouvions toujours des écolos pour nous dire : « mais les juifs ont droit à un pays après ce qu’ils ont subi ». Ils oubliaient juste que ces juifs étaient européens et que la Palestine ne se trouvait pas en Europe. Les discussions furent très violentes. Jean Brière également membre fondateur des verts a été exclu sur un texte qu’il avait diffusé en 1990, au moment de la guerre contre l’Irak : « Israël pays raciste, fasciste, militariste et belligène ». Il a été traité d’antisémite et traîné dans la boue.

J’ai été également exclue pour avoir prôné Un seul Etat sur la terre de Palestine de la Méditerranée au Jourdain, multiculturel et pluriel pour tous ses habitants. Ils ont pris comme prétexte le fait que je laissais traîner mes textes partout ce qui était incompatible avec des valeurs vertes. Quelles sont ces valeurs vertes qui veulent protéger un Etat Ethnique, colonial, militariste et raciste ?

J’avais beau leur répondre qu’il y avait déjà assez de murs et je n’étais pas prête à en construire un autour de mes textes.

Je continue à rester écologiste et anticolonialiste et à exiger des réparations pour ces peuples victimes de notre essor industriel.

Je ne séparerai jamais les deux combats.

Paris, 8 juillet 2009
Ginette Hess Skandrani

1 Message

  • Salut Ginette,

    Je suis d’accord avec beaucoup de choses théoriques de ton texte ; mais, quand tu te dis : « contre la domination de l’homme sur les autres espèces vivantes. », je ne suis pas d’accord.

    Enfin, cela dépend de quoi l’on parle exactement. Je prends un exemple pour me faire comprendre : imaginons qu’un ours m’attaque et veuille me tuer, si j’ai un fusil, je n’aurais alors aucune hésitation à le tuer avant qu’il me tue si je n’ai pas d’autre moyen de sauver ma peau. Et ce, même si c’est le dernier ours de la planète. J’ai un fusil et pas lui, et je m’en sers pour survivre. L’homme a par ce fait dominé l’animal. Peux-tu cependant sérieusement me le reprocher ?

    Plus généralement, si le jardinier peut cultiver des salades dans son jardin, c’est parce que l’espèce homme domine l’espèce salade. Voudrais-tu "interdire" la culture des salades ?

    Et, même si l’homme ne cultive pas les salades, mais se contente de les cueillir dans une nature qu’il n’a encore jamais modifiée. Quand il cueille les salades pour les manger, ne les domine-t-il pas ?

    Bien sûr que si !

    Donc : je ne peux pas être d’accord avec toi, quand tu dis que l’on doit être « contre la domination de l’homme sur les autres espèces vivantes. »

    En fait, on n’a tout simplement pas le choix : faut bien manger ! et, si l’on peut, éviter d’être soi-même mangé !

    Bien à toi,
    do
    http://mai68.org

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