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Afrique du sud - Le rôle de Jonas Savimbi et de la CIA

jeudi 5 décembre 2013, par anonyme (Date de rédaction antérieure : 5 décembre 2013).

Victoire pour l’Angola
La marionnette des Etats-Unis a mordu la poussière !

http://mai68.org/textes/savimbi.htm

par G. Dunkel, février 2002

Lorsque la nouvelle s’est répandue, le 22 février dernier, que Jonas Savimbi avait été abattu dans une embuscade de l’armée au Sud-Est de l’Angola, la réaction générale en Angola et dans le reste de l’Afrique a été une réaction de jubilation. Savimbi était l’homme le plus détesté et le plus méprisé en Angola.

Sa mort a été considérée comme une victoire majeure au cours des 41 ans de la lutte armée livrée par le peuple angolais contre l’impérialisme. On espérait que la paix - du moins, la fin du conflit armée - pouvait être proche.

Les grands médias occidentaux - le New York Times, la BBC, CNN, le Financial Times, le Washington Post - ont présenté Savimbi comme un personnage charismatique », « un dirigeant dans la lutte contre l’impérialisme portugais », « l’un des combattants d’une lutte à trois reposant sur le tribalisme » pour le contrôle de l’Angola, etc. Ils prétendent qu’il avait des liens avec la Chine, qu’il admirait Che Guevara et qu’il avait adopté le mode de la « guerre populaire ».

Tout cela, c’est du vent. En réalité, Savimbi était une marionnette de l’impérialisme américain au cours d’une guerre contre le gouvernement révolutionnaire de l’Angola qui a fait au moins 500.000 morts, des dizaines de milliers de mutilés à vie en raison des mines terrestres de fabrication américaine, des milliards et des milliards de dollars de destructions matérielles, une misère immense et une dette que l’Angola va mettre des décennies à rembourser.

Les comptes rendus capitalistes sur la vie de Savimbi ne sont qu’un tissu de distorsions. Par exemple, il n’était en rien un opposant au colonialisme portugais, qui était financé, armé et soutenu par les Etats-Unis, un allié de l’OTAN.

Au début des années 70, l’organisation de Savimbi, l’UNITA, conclut un accord formel avec l’armée portugaise en vue d’une coopération militaire dans la lutte contre le MPLA, qui dirigeait la lutte contre les Portugais et qui, actuellement, dirige le gouvernement angolais. (Voir l’ouvrage de William Miller : « Opération Timber : Documents pour le dossier Savimbi », pour plus de renseignements). Ceci n’est pas qu’une note historique mais mineure : elle laisse présager des arrangements militaires et politiques de Savimbi avec le régime sud-africain de l’apartheid, avec la CIA et avec l’aile reaganienne la plus réactionnaire de la classe dirigeante américaine.

Le MPLA, grâce à une aide importante de la révolution cubaine, vint à bout en 1975 d’une invasion menée par l’armée de l’apartheid sud-africain, invasion qui avait été orchestrée en vue d’installer l’UNITA au pouvoir à Luanda. Après cette défaite, la CIA reprit le remplumage et la reconstruction de l’UNITA, tandis que l’Afrique du Sud de l’apartheid fournissait le muscle militaire. Le rôle de la CIA en Angola, jusque 1978, est étudié en détail dans l’ouvrage de John Stockwell « In Search of Enemies » (A la recherche des ennemis). Stockwell était le principal responsable de la CIA en Angola, mais il finit par s’opposer à l’agence. Alors que la connexion entre Savimbi et la CIA est bien documentée, ni le New York Times ni le Washington Post ne l’ont mentionnée dans leurs récents articles sur la mort du personnage.

La lutte se poursuivit avec des hauts et des bas jusqu’à ce que les Angolais, les Namibiens et les Cubains vainquirent les Sud-Africains lors de la bataille de Cuito Cuanavale en 1988. Cette défaite déboucha sur un accord qui impliquait le retrait des Cubains de l’Angola en échange de l’indépendance de la Namibie et de la fin des invasions sud-africaines.

Après Cuito Cuanavale, les Américains, agissant sous les auspices des Nations unies, s’arrangèrent pour mettre sur pied deux accords concernant la paix et les élections. Mais, chaque fois, l’UNITA perdit les élections, et même lorsque des observateurs internationaux affirmèrent qu’elles étaient fondamentalement libres et honnêtes, Savimbi cria à la fraude et reprit le combat. La seule solution qu’il voulait bien accepter était une solution abandonnant tout le contrôle de l’Angola à l’UNITA.

Qu’en est-il de l’Angola actuellement ?

L’Angola est un pays désespérément pauvre, ruiné par la guerre, profondément endetté, présentant l’un des niveaux de vie les plus pauvres de la planète. Quelque 4 millions de personnes - un tiers de la population - (illisible). Le pays fournit toujours 8% du pétrole que consomment les États-Unis. C’est un peu surprenant mais cela constitue une raison de l’intérêt soutenu et intense que les États-Unis ont pour le pays. Depuis 1992, lorsque Savimbi quitta le processus de paix et des élections et qu’il relança la guerre civile, les Etats-Unis suivirent une stratégie à deux branches. Ils donnèrent à Savimbi suffisamment d’argent ou suffisamment d’accès au marché diamantaire mondial pour qu’il poursuive le combat. Dans un même temps, ils proposèrent au gouvernement du MPLA une reconnaissance diplomatique, une aide au développement et l’accès aux marchés américains pour les marchandises autres que le pétrole, de même que des emprunts s’ils faisaient un marché avec Savimbi, marché que ce dernier accepterait.

Bien sûr, tout le monde savait que le seul marché que Savimbi accepterait jamais était la capitulation du MPLA mais, alors que ce processus était en cours, l’UNITA eut le temps et la possibilité de se regrouper et de se réarmer.

Puisque les Etats-Unis et la CIA étaient si étroitement et si ouvertements liés à Savimbi, une bonne partie des manoeuvres politiques qui eurent lieu en Angola furent menées sous les auspices des Nations unies.

Alors que les Etats-Unis y allaient d’une approche à deux facettes, deux groupes se développèrent au sein du mouvement angolais. L’un estimait qu’un accord avec Savimbi était possible. L’autre, spécialement bien représenté au sein de l’armée angolaise (FAA) estimait que la seule solution possible était d’écraser l’UNITA pour de bon. Après que le dernier accord avec Savimbi se fut rompu en 1996, le gouvernement adopta une « approche selon deux pistes », proposant le dialogue tout en maintenant une pression militaire sur l’UNITA.

Fin 2001, les FAA lancèrent une vaste offensive qui balaya l’UNITA des positions fortes traditionnelles qu’elle occupait depuis des années et força ses unités armées à battre en retraite en direction de la frontière zambienne, au Sud-Est de l’Angola. Comme le succès de l’offensive devenait évident, une campaghne de propagande fut lancée au nom de la paix.

Le 6 février, le service de presse IRIN des Nations unies interviewa Abel Chivukuvuku, ancien conseiller politique de Savimbi. Cette interview offrit à Chivukuvuku le possibilité de proposer un processus de paix de deux mois au gouvernement angolais et que superviseraient les Nations unies, processus soumis à la reconnaissance du fait qu’il ne pouvait y avoir de solution militaire aux problèmes du pays.

Les Etats-Unis, souvenez-vous, sont tout juste en train de préparer une guerre de grande intensité partout dans le monde, prétendument parce que 3.000 personnes ont perdu la vie le 11 septembre. Mais l’Angola, qui a perdu un demi-million de personnes dans une guerre fomentée et financée par les Etats-Unis, doit permettre à ses ennemis d’entrer au gouvernement au nom de la paix. Si l’on s’en tient à cette logique, George W. Bush devrait inviter Oussama ben Laden dans son cabinet !

L’IRIN rapportait, le 13 février, que l’agence irlandaise de développement, GOAL, condamnait ce qu’elle appelait « la politique de la terre brûlée des FAA ». Elle ne se posait toutefois pas la question de savoir comment le gouvernement MPLA pouvait protéger son peuple des atrocités commises par l’UNITA.

Le même jour de la nouvelle de la mort de Savimbi, l’IRIN faisait état d’une conférence nationale des dirigeants traditionnels de l’Angola réclamant un cessez-le-feu immédiat et la création d’une conférence nationale souveraine afin de discuter de l’avenir politique du pays. Cette conférence était sponsorisée par l’Open Society Foundation, une création de George Soros, le financier international, nabab de Wall Street et spéculateur de dévises.

Le 26 février, le président angolais Jose Eduardo Dos Santos doit s’entretenir avec George W. Bush, en compagnie des présidents du Mozambique et du Malawi, au sujet de la sécurité de la région. Manifestement, le direction de l’Angola après la mort de Savimbi va devenir un sujet de discussion de première importance…

Même si l’Angola peut mettre un terme à une guerre civile de 27 ans sans qu’il y ait encore de combats importants, il va être confronté à des problèmes majeurs. Son économie est complètement dévastée et il lui fait l’approbation du FMI pour emprunter les fonds dont il a besoin pour entamer sa reconstruction. Mais le prix politique exigé actuellement par le FMI est trop élevé pour n’importe quel pays pauvre.

La lutte armée pourrait éventuellement être terminée, mais la lutte générale va continuer. Comme le disent les héros de la révolution africaine et de la lutte contre le colonialisme portugais, « a luta continua ».

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