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Les banques, nouveaux délinquants ou victimes expiatoires ?

lundi 1er juin 2015, par anonyme (Date de rédaction antérieure : 1er juin 2015).

Remarque de do : en condamnant exclusivement un secteur particulier du capitalisme, le secteur bancaire, on sauve le capitalisme en général.

Dans la période actuelle, commencée avec la "crise" de 2007-2008, les révolutionnaires ont tendance à accuser les banques de tous les maux. C’est une grave erreur d’analyse.

En réalité, c’est l’exploitation de l’homme par l’homme en général qui est coupable ; et, en particulier sa forme actuelle : le capitalisme.

Accuser le secteur financier, les banques, de tous les maux, c’est innocenter le vrai coupable : le capitalisme, dont le secteur bancaire sert aujourd’hui de bouc-émissaire, c’est-à-dire effectivement de "victime expiatoire".

Les banques, nouveaux délinquants ou victimes expiatoires ?

http://www.letemps.ch/Page/Uuid/451…

Un œil sur la place financière - lundi 01 juin 2015

L’actualité récente a été régulièrement ponctuée par l’annonce d’enquêtes lancées contre des institutions bancaires tant en Suisse qu’à l’étranger. Des traits caractéristiques de ces procédures peuvent être relevées

Par Shelby du Pasquier, Avocat chez Lenz & Staehelin

L’actualité récente a été régulièrement ponctuée par l’annonce d’enquêtes lancées contre des institutions bancaires tant en Suisse qu’à l’étranger. Ces enquêtes se soldent typiquement par le paiement d’amendes de plus en plus importantes, récemment couplées à la condamnation pénale des institutions concernées. Les domaines concernés sont variés et incluent le blanchiment d’argent, la fiscalité, la violation des règles en matière d’embargo, le droit de la concurrence, etc. A l’évidence, les autorités américaines, notamment le US Department of Justice ainsi que, à New York, le Department of Financial Services, ont été des moteurs importants dans le lancement de ces procédures. D’autres autorités de surveillance se sont toutefois jointes à cet effort, notamment, en Angleterre, le FCA (Financial Conduct Authority) et, en Suisse, la Comco et la Finma.

Les développements qui ont défrayé la chronique et qui touchent à la manipulation du Libor et tout récemment aux abus en matière de taux de change (« affaire Forex »), impliquant des autorités de surveillance européennes, américaines, anglaises et suisses et le prononcé d’amendes se chiffrant en milliards de dollars américains, sont des illustrations frappantes de ce phénomène.

Au-delà des particularités de chaque dossier, l’on peut relever certains traits caractéristiques de ces procédures.

– Tout d’abord, la taille des amendes qui sont prononcées. Alors que celles-ci se chiffraient il y a quelques années en dizaines de millions de francs (ou plus souvent en euros ou dollars), les pénalités imposées aux banques dans le cadre de ces procédures se calculent maintenant en centaines de millions, voire en milliards de dollars. Ainsi, à titre d’exemple, UBS a-t-elle dû faire face à une amende de 780 millions de dollars en 2009 dans le contentieux fiscal américain, alors que ce dossier a coûté 2,6 milliards en 2014 à Credit Suisse. Dans le domaine des embargos, l’amende de 8,9 milliards de dollars prononcée en juin 2014 à l’encontre de BNP Paribas pour violation de la réglementation américaine est encore dans tous les esprits.

– Hormis le montant de l’amende, l’issue de ces enquêtes a également évolué dans le temps, surtout s’agissant des procédures conduites outre-Atlantique. Alors que, le plus souvent, les enquêtes se concluaient par des transactions, aux termes desquelles les institutions ne reconnaissaient pas de responsabilité propre (afin d’éviter les conséquences civiles d’une telle reconnaissance), la forme de ces accords a mué et passe dorénavant par une admission systématique de responsabilité de la part des institutions concernées. La forme de ces « transactions » a par ailleurs évolué, les autorités américaines insistant de plus en plus souvent sur une condamnation de l’institution – suspendue le cas échéant (« Deferred Prosecution Agreement », ou DPA) ou pas (« guilty plea »). Tout récemment, les autorités américaines – et c’est une première – n’ont par ailleurs pas hésité à révoquer un sursis précédemment octroyé et forcé l’institution à plaider coupable. Il s’agissait du DPA conclu par UBS dans le dossier du Libor, qui a ainsi été révoqué suite aux développements touchant le dossier Forex.

– Dans certains cas, la sanction financière s’accompagne de mesures de surveillance (dont la mise en place de chargés d’enquêtes externes, ou « monitors »), voire de restrictions, temporaires ou non, touchant à la conduite de certaines activités ou l’accès à des marchés déterminés. L’on doit probablement s’attendre à ce que les banques condamnées se voient exclure de certains segments de clientèle (par exemple, la gestion des fonds de pension aux Etats-Unis).

– Pendant longtemps, seule l’institution était visée par l’enquête et le cas échéant sujette à des sanctions. Là également, l’on constate un changement important avec la mise en cause directe par l’autorité de surveillance des personnes ayant participé aux faits incriminés. Cette mise en cause peut prendre différentes formes, dont le lancement par l’autorité de procédures d’« enforcement » contre les cadres concernés, l’exigence de procédures disciplinaires, allant jusqu’à la mise à pied, ou encore la poursuite pénale des employés les plus exposés. La procédure pénale ouverte en Angleterre contre Tom Hayes, ex-trader accusé d’avoir manipulé le taux interbancaire Libor, en est une illustration toute récente.

Ces développements amènent naturellement à s’interroger sur les motifs de cette évolution. En particulier, l’on peut se demander s’il faut voir dans la multiplication de ces procédures et l’escalade des amendes une aggravation dans la « pathologie » du comportement des institutions financières, qui à son tour justifierait la sévérité accrue des autorités de surveillance. Une telle analyse doit être relativisée considérant que les faits sous enquête remontent souvent à plusieurs années et ne reflètent pas, ou plus, le comportement actuel des institutions en question. Une autre explication doit probablement être cherchée dans le changement d’attitude que l’on a pu observer vis-à-vis du secteur bancaire depuis la crise financière de 2008. Le désenchantement qui en a résulté pour le secteur financier, vu par certains comme étant responsable de cette crise, a clairement contribué selon nous à une approche de plus en plus intransigeante de la part des autorités envers les institutions dont elles ont la charge. Aux Etats-Unis, certaines des procédures lancées contre les banques se sont d’ailleurs focalisées sur les comportements jugés inacceptables d’institutions bancaires dans ce contexte (voir par exemple la mise en cause d’établissements bancaires américains dans leur recouvrement de prêts en défaut).

En Suisse, ce changement d’attitude est illustré par la disparité entre le ton et les conclusions de la Finma du dossier fiscal américain pour UBS en 2009 respectivement pour Credit Suisse en 2014. La récente multiplication des procédures d’« enforcement » par la Finma, reflétée dans son premier rapport sur le sujet en février de cette année, est un autre signe de cette évolution, de même que la mise en cause annoncée d’employés de banque impliqués dans les procédures en question.

Une autre explication de la taille grandissante des amendes prononcées doit probablement être recherchée dans la nature et l’ampleur même des comportements incriminés dans certains dossiers récents (notamment dans les scandales liés à la manipulation de taux d’intérêt ou de taux de change), ce à quoi s’ajoutent le caractère multi-juridictionnel des enquêtes et le nombre d’établissements impliqués. L’on peut également penser que l’attitude extrêmement agressive des autorités américaines, opérant dans un cadre judiciairement peu contrôlé, a fait des émules auprès de leurs homologues européens et contribué à l’escalade des amendes. Parent « pauvre », la Suisse est pour sa part contrainte par le cadre législatif existant en matière bancaire, qui ne permet pas le prononcé d’amendes « punitives » auprès des institutions concernées mais uniquement la confiscation des profits illicites.

En tout état de cause et quels que soient les motifs qui ont conduit à la situation actuelle, l’on doit s’attendre à ce que les nuages qui obscurcissent l’horizon bancaire ne se dissipent pas de sitôt.

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