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A quoi bon reconstruire l’Irak ?

vendredi 16 février 2018, par anonyme (Date de rédaction antérieure : 16 février 2018).

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Publié par Gilles Munier sur son site le 15 Février 2018, 09:34am

Revue de presse : La Chronique de Jean-Marc Four (France Inter -14/2/18)

30 milliards de dollars, c’est la somme récoltée aujourd’hui à l’issue de 3 jours de conférence à Koweït, en vue de reconstruire l’Irak. Après 15 années de guerre quasi ininterrompue, ça parait indispensable, mais à quoi bon reconstruire l’Irak maintenant ? C’est le "monde à l’envers" d’aujourd’hui ?

Je ne sais pas si vous avez remarqué, mais souvent, on est plus efficace à détruire qu’à construire !

Sur le principe, évidemment qu’il faut reconstruire l’Irak ! Depuis le début de l’intervention américano-britannique en 2003, le chaos n’a pas cessé. Du coup, le chantier est colossal.

Vous voulez des exemples ? Il y en a à la pelle !

Dans certaines parties de Bagdad, la capitale, il n’y a ni eau, ni égouts, ni électricité.

En l’absence d’Etat central, les seuls quartiers à fonctionner correctement sont ceux contrôlés par des milices ou des gangs. A Mossoul, au Nord, il n’y a plus d’aéroport. A Ramadi, à l’Ouest de Bagdad, les rues restent truffées de mine.

Les chemins de fer n’existent plus, seule la liaison entre Bagdad et Samarra vient de rouvrir.

Les hôpitaux sont en déshérence. Plusieurs raffineries de pétrole sont hors service.

Et des centaines de milliers de maisons individuelles sont détruites. On se résume, ce ne sont pas les chantiers qui manquent !

Pendant ces 3 jours de conférence sur la reconstruction à Koweït, des dizaines de pays et près de 2000 entreprises étaient représentés. Et Bagdad espérait récolter 90 milliards de dollars.

Résultat : 30 milliards. Pas besoin d’être fort en maths pour comprendre, c’est 3 fois moins qu’espéré.

Une instabilité politique persistante

Pourquoi tout le monde hésite ?

Alors, il y a d’un côté les Etats et de l’autre les entreprises. Commençons par les Etats.

Déjà, on parle de 30 milliards, mais en fait c’est moins. Exemple : le plus gros donateur c’est la Grande-Bretagne avec 10 milliards. Mais en fait c’est 1 milliard par an sur 10 ans, et avec des conditions à la clé.

Les puissants voisins, saoudiens, qataris, donnent modestement 1 milliard.

Les Etats-Unis ne donnent rien (pourtant ce n’est pas faute que leurs troupes aient mitraillé dans le secteur) et la France a du mal à chiffrer précisément son aide.

En fait, les Etats hésitent pour deux raisons.

1. Ils ont d’autres chats à fouetter : l’Arabie Saoudite est accaparée par sa guerre au Yémen, les Etats-Unis veulent se redéployer en Afghanistan, etc.

2. La situation politique en Irak n’est pas stabilisée.

D’accord, il y a, grosso modo, une victoire militaire contre le groupe Etat Islamique, mais c’est tout. Pour le reste, l’Irak est toujours dans le chaos politique, avec une minorité sunnite marginalisée par la majorité chiite. Et tant que la situation politique est instable, l’argent de la reconstruction risque d’alimenter les luttes confessionnelles.

Vous savez ce que disent les Bagdadis ? Ils disent « les brigands nous pillent au nom de la religion ».

Corruption et insécurité

Les entreprises, elles, sentent bien qu’il y a de l’argent à faire. On est dans un pays avec une élite qui en a plein les poches et une manne pétrolière conséquente.

En France par exemple, des sociétés comme Thalès, Total, Alstom, Veolia, Lafarge, peuvent évidemment y trouver des marchés.

Le problème, c’est que les risques sont multiples.

La corruption généralisée d’abord, on estime qu’elle avale de l’ordre de la moitié des investissements dans le pays. La moitié !

La sécurité ensuite : il reste ici et là des poches tenues par le groupe Etat Islamique. Et plus encore il y a les milices religieuses, près d’une centaine dans le pays.

Et puis il y a le manque de personnel qualifié : de nombreux cadres ont fui et se sont réfugiés chez les voisins, dans le Golfe Persique en particulier.

Sans compter que l’intérêt des entreprises privées n’est pas toujours de répondre aux besoins de services publics, écoles, hôpitaux ou adductions d’eau.

Tout cela, disons-le, rend pessimiste.

D’autant qu’il y a un précédent. C’est l’Afghanistan.

Entre 2002 et 2012, il y a eu 6 conférences internationales sur la reconstruction de l’Afghanistan. A chaque fois, on a eu droit à de beaux engagements financiers.

Regardez, je vous ai apporté cet article d’archives : 2008 conférence à Paris, ram dam et roulement de tambours, 20 milliards pour l’Afghanistan !!

10 ans après, vous avez eu où nous en sommes en Afghanistan ? Le chaos total.

Et bien on peut craindre la même chose pour l’Irak. Que l’argent disparaisse comme dans le tonneau des Danaïdes. Et que du coup, les mêmes causes (pauvreté et confessionnalisme) produisent les mêmes effets : violence et terrorisme.

Donc non, désolé, ça ne rend pas optimiste.

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