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Course électorale européenne : la victoire du Cycliste Inconnu !

lundi 27 mai 2019, par Luniterre

Évidemment, des élections "démocratiques" bourgeoises, on a rien de bon à attendre, et si l’on en attendait ne serait-ce qu’un signe, on est généralement déçus, et ici, même par le taux d’abstention !!!

La bombinette du cycliste lyonnais a sans doute joué un rôle, mais ne suffit pas à expliquer un tel renversement de tendance. Il faut bien constater que le système a en grande partie "repris la main"…

…Une main que les GJ lui ont tendu, en réalité, par leur aveuglement "apolitique", même si c’est bien involontairement, pour la plupart…

Éviter de tomber dans les pièges manipulatoires est une leçon utile en toutes époques, et dans ce sens, l’histoire d’Auguste Vaillant reste terriblement d’actualité.

Mais ceci dit, et contrairement à une hypothèse avancée ici même, sur VLR, ce n’est pas Louis Andrieux qui a pu manigancer le coup de la "bombe Vaillant". En effet, son bouquin parait en 1885, et il ne peut donc y parler d’une affaire se déroulant fin 1893 !

http://mai68.org/spip/IMG/pdf/Souvenir-d-un-prefet-de-police_Louis-Andrieux_N0061678_PDF_1_-1DM.pdf

Louis Andrieux a été Préfet de Police de Paris de 1879 à 1881, et a eu ensuite, et même avant, une carrière politique (centre-droit).

Néanmoins, en tant que Préfet de Police, il a effectivement manipulé les mouvements anarchistes, et notamment en finançant leur journal, "la Révolution sociale", par des voies "détournées"…

C’est ce qu’il raconte effectivement dans ses mémoires, après allusion à un autre projet d’attentat au Palais Bourbon, mais donc plus ancien et inabouti, de fait.

En cherchant pas mal, j’ai finalement retrouvé "l’homme de l’art" pour 1893, un certain Louis Puibaraud, [ Président du comité des inspecteurs généraux, puis nommé Directeur général des recherches – http://www.sfhp.fr/index.php?post/2… ], un ultra-réac encore plus machiavélique, si possible, et son implication, probablement assez directe, même, dans l’affaire Vaillant, ne semble guère faire de doute, selon les sources que j’ai pu retrouver.

Ceci dit, encore, bien qu’il ait également écrit des bouquins, Puibaraud n’a nullement revendiqué de responsabilité dans cet attentat.

Toutefois, d’autres témoignages assez précis, de source policière aussi bien que de source anarchiste, tendent à démontrer que l’affaire Vaillant était bien une machination politico-policière, en vue de faire voter la toute première des lois dites "scélérates", qui ont encore une postérité très actuelle, donc sous Macron !!!

Auguste Vaillant, lui, a été "jugé" et décapité, dans la foulée.

Les deux sources principales retrouvées viennent donc d’être republiées conjointement sur Front des Laïcs et TML :

https://tribunemlreypa.wordpress.com/2019/05/27/de-lanarchie-policiere-et-de-la-vie-intime-des-commissariats/

*******

Quant au passage cité de Louis Andrieux, le voici :

Le fonds des reptiles – L’anarchie subventionnée. Les collaborateurs inconscients du préfet de police.

Le sujet choisi pour le précédent chapitre répondait à une intention lénitive. Après les orages qu’avaient soulevés les récits d’intervention en des matières délicates, il était bon de calmer les esprits par le spectacle d’une œuvre de charité.

Je crains d’aborder de nouveau un sujet irritant. Je m’y décide parce que je crois faire une œuvre utile en contribuant à répandre la méfiance entre les divers adhérents des groupes révolutionnaires.

« Soupçonnons-nous les uns les autres, » telle est leur maxime ; elle est juste et salutaire

Æquum et salutare,

comme on dit à l’église.

Elle est juste, car dans leurs rangs la police recrute facilement des agents ; tous ne valent pas la peine d’être achetés, mais beaucoup sont à vendre.

Elle est salutaire, car la méfiance qu’ils ont les uns vis-à-vis des autres contribue à leur impuissance beaucoup plus qu’à leur sûreté. Citoyens, il y aura toujours des traîtres parmi vous.

Les socialistes révolutionnaires ne se bornaient plus à des déclamations dans les réunions publiques ou privées. La dynamite des nihilistes les empêchait de dormir et, pour stimuler le zèle des compagnons, ils se proposaient, eux aussi, de faire entendre la grande voix des explosions ultima ratio.

Il était question de faire sauter le Palais-Bourbon M. Gambetta en avait été avisé, et quelques précautions avaient été prises.

Mais, en même temps qu’ils songeaient à étonner le monde par la destruction de mon honorable ami M. Truelle, les compagnons voulaient avoir un journal pour propager leurs doctrines.

Si j’ai combattu leurs projets de propagande par le fait, j’ai du moins favorisé la divulgation de leurs doctrines par la voie de la presse, et je n’ai pas de raisons pour me soustraire plus longtemps à leur reconnaissance.

Les compagnons cherchaient un bailleur de fonds ; mais l’infâme capital ne mettait aucun empressement à répondre à leur appel. Je poussai par les épaules l’infame capital, et je parvins à lui persuader qu’il était de son intérêt de favoriser la publication d’un journal anarchiste.

On ne supprime pas les doctrines en les empêchant de se produire, et celles dont il s’agit ne gagnent pas à être connues.

Donner un journal aux anarchistes, c’était d’ailleurs placer un téléphone entre la salle des conspirations et le cabinet du préfet de police. On n’a pas de secrets pour un bailleur de fonds, et j’allais connaître, jour par jour, les plus mystérieux desseins. Le Palais-Bourbon allait être sauvé ; les représentants du peuple pouvaient délibérer en paix.

Ne croyez pas, d’ailleurs, que j’offris brutalement aux anarchistes les encouragements du préfet de police.

J’envoyai un bourgeois, bien vêtu, trouver un des plus actifs et des plus intelligents d’entre eux. Il expliqua qu’ayant acquis quelque fortune dans le commerce de la droguerie, il désirait consacrer une partie de ses revenus à favoriser la propagande socialiste.

Ce bourgeois qui voulait être mangé n’inspira aucune suspicion aux compagnons. Par ses mains, je déposai un cautionnement dans les caisses de l’État, et le journal la Révolution sociale fit son apparition.

C’était un journal hebdomadaire, ma générosité de droguiste n’allant pas jusqu’à faire les frais d’un journal quotidien.

Mlle Louise Michel était l’étoile de ma rédaction. Je n’ai pas besoin de dire que « la grande citoyenne » était inconsciente du rôle qu’on lui faisait jouer, et je n’avoue pas sans quelque confusion le piège que nous avions tendu à l’innocence de quelques compagnons des deux sexes.

Tous les jours, autour d’une table de rédaction, se réunissaient les représentants les plus autorisés du parti de l’action on dépouillait en commun la correspondance internationale on délibérait sur les mesures à prendre pour en finir avec « l’exploitation de l’homme par l’homme » ; on se communiquait les recettes que la science met au service de la révolution.

J’étais toujours représenté dans les conseils, et je donnais au besoin mon avis.

Mon but était surtout de surveiller plus facilement les honorables compagnons, en les groupant autour d’un journal.

Louis Andrieux, Souvenirs d’un préfet de police, 1885.

A noter encore, pour l’anecdote, que ce Louis Andrieux est le père "naturel" de …Louis Aragon ! Enfant qu’il n’a jamais reconnu, mais dont il a néanmoins entretenu la maman par des voies également tout à fait indirectes, pour ne pas faire scandale, ni dans sa famille, ni dans celle de cette jeune femme, qui passait officiellement pour la "sœur" …de son fils, supposé être un fils "adoptif" …de sa grand-mère, donc ! Tout étant au mieux, ainsi, dans le "meilleur des mondes", ou presque !!!

Luniterre

LOUIS ARAGON, CHANTÉ PAR JEAN FERRAT

https://youtu.be/RRVdZx9ABDU6

EXTRAIT DU POÈME :

"…Je ne dis pas cela pour démoraliser Il faut regarder le néant

En face pour savoir en triompher Le chant n’est pas moins beau quand il décline

Il faut savoir ailleurs l’entendre qui renaît comme l’écho dans les collines

Nous ne sommes pas seuls au monde à chanter et le drame est l’ensemble des chants

Le drame il faut savoir y tenir sa partie et même qu’une voix se taise

Sachez le toujours le chœur profond reprend la phrase interrompue

Du moment que jusqu’au bout de lui même le chanteur a fait ce qu’il a pu

Qu’importe si chemin faisant vous allez m’abandonner comme une hypothèse

J’écrirai ces vers à bras grands ouverts qu’on sente mon cœur quatre fois y battre

Quitte à en mourir je dépasserai ma gorge et ma voix mon souffle et mon chant

Je suis le faucheur ivre de faucher qu’on voit dévaster sa vie et son champ

Et tout haletant du temps qu’il y perd qui bat et rebat sa faux comme plâtre

Louis Aragon

Épilogue, 1960

6 Messages de forum

  • Salut Luniterre,

    Il y a effectivement peu de chance qu’en 1885 Louis Andrieux ait pu écrire ses souvenirs de 1893. J’ai bêtement fait confiance à tutu :

    http://mai68.org/spip/spip.php?arti…

    Néanmoins il reste possible qu’Andrieux ait pu écrire ça dans un autre de ses livres :

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Louis…

    Il n’en reste pas moins comme je dis ici :

    http://mai68.org/spip/spip.php?arti…

    que : « J’ai eu en main aussi le livre d’un policier de la fin du 19e siècle ou du début du 20e siècle et qui explique comment il a manipulé un anarchiste pour lui faire envoyer une bombe dans le parlement français. Mais je n’ai pas ce livre et je ne me souviens ni du nom du policier qui a manipulé Auguste Vaillant, ni de l’éditeur. Il existe, je l’ai lu. C’est tout ce que je puis dire… Si quelqu’un en sait plus qu’il m’écrive, merci. »

    Et tutu disait que c’était Andrieux. Mais la référence qu’il me donnait était fausse, comme tu l’a décelé. Je n’avais pas vérifié.

    Autre lien intéressant :

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Propa…

    A+
    do
    http://mai68.org/spip2

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      • Bonjour, camarade

        Ce « Serpent Libertaire » ne fait, comme beaucoup de pseudos « spécialistes » qu’une mauvaise compilation de notices Wikipédia, et en retire un « mélange » complètement faux, au final.

        Extraits de la notice « Maitron » d’Egide Spilleux, autre anar travaillant pour les flics, et de son plein gré, celui-là…

        http://maitron-en-ligne.univ-paris1.fr/spip.php?article155982

        « Avec l’aval du préfet, Serraux [Spilleux de son vrai nom] aurait organisé un attentat contre la statue de Thiers récemment inaugurée à Saint-Germain. L’attentat, commis dans la nuit du 15 au 16 juin 1881 par un groupe d’anarchistes marseillais manipulés, ne fit aucun dégât, si ce n’est une mince tache noire sur la statue. »

        [ Cette date, en 1881, soit plus de dix ans avant l’attentat de Vaillant, est attestée par de nombreuses sources. Dans mes recherches il y avait même un récit détaillé de cet épisode burlesque, mais je ne l’ai pas conservé, précisément à cause du décalage temporel.]

        « Finalement le préfet de police considéra que le dispositif [ de financement du journal ] coûtait trop cher pour ce qu’il rapportait et, quittant son poste, coupa les vivres à La Révolution sociale, qui s’éteignit le 18 septembre 1881, au 56e numéro. Dans le numéro du 11 septembre, Serraux avait publié une mélodramatique lettre d’adieux. Il disparut ensuite de la circulation.
        Il fut dénoncé comme mouchard dans Le Révolté du 22 juillet 1882.
        Trois ans plus tard, Louis Andrieux se vanta de cet épisode dans le tome I (page 339) de ses Souvenirs d’un Préfet de police, »

        [>>> c’est le passage republié dans mon post.]

        La « bombe » de St Germain en Laye n’était qu’un gros pétard, par souci de sécurité, et sans risque réel, même pour la statue !

        Le ridicule de la situation a mis fin au projet. D’après le récit, que je vais essayer de retrouver, les flics étaient-même directement sur place, surveillant « discrètement » la scène, mais sans intervenir, tant la situation était grotesque.
        D’après ce récit ce fut la seule et unique tentative d’Andrieux dans le genre attentat manipulé.

        Sa « philosophie » telle qu’il l’exprime lui-même, va plutôt vers une sorte de récupération semi-légaliste du mouvement, plutôt qu’une répression totale.

        La « philosophie » de Puibaraud, dix ans plus tard, c’est l’écrasement total du mouvement, comme objectif. Ce qui aurait contribué, de par le fait, au développement de la tendance anarcho-syndicaliste, selon certains historiens.

        De toutes façons, quoi qu’il en soit, la carrière d’Andrieux dans la police se termine donc bien cette même année 1881 !

        Luniterre

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        • Salut Luniterre,

          Wikipedia dit : « Andrieux est élu député du Rhône en 1876, puis des Basses-Alpes en 1885. Battu en 1889, il se présente dans plusieurs départements, sans arriver à se faire élire. Élu sénateur des Basses-Alpes en 1903, il est invalidé. Ce n’est qu’en 1910 qu’il redevient député des Basses-Alpes et le reste jusqu’en 1924. Directeur du Jour en 1883 puis de La Ligue en 1884-1885, il est aussi le fondateur et le rédacteur en chef du Petit Parisien, journal populaire de l’époque. »

          Andrieux termine sa carrière dans la police en 1881, du moins officiellement. En réalité, j’en sais rien. il a très bien pu faire dans la provocation policière après. Mais peut-être pas.

          De tout façon, tu affirmes : « Ceci dit, encore, bien qu’il ait également écrit des bouquins, Puibaraud n’a nullement revendiqué de responsabilité dans cet attentat. »

          Donc, si c’est vrai que Puibaraud n’en parle dans aucun de ses livres, alors c’est pas lui qui a manipulé Vaillant puisque j’ai eu en main un livre où la personne qui l’écrivait disait avoir manipulé Vaillant.

          A+
          do
          http://mai68.org

          Répondre à ce message

          • Tu avances : "Donc, si c’est vrai que Puibaraud n’en parle dans aucun de ses livres, alors c’est pas lui qui a manipulé Vaillant puisque j’ai eu en main un livre où la personne qui l’écrivait disait avoir manipulé Vaillant."

            Ne vois tu pas la faiblesse de cet argument, camarade ??? L’expérience et l’histoire montrent qu’à l’évidence l’aveu ou le non-aveu ne sont une preuve de rien du tout, en l’absence d’autres éléments probants…

            Or ceux que j’ai publiés sur TML se recoupent pour charger et Dupuy et Puybaraud, tous deux aux manettes politiques et policières à ce moment précis, sur Paris.

            Ces docs republiés sur TML sont d’Ernest Raynaud, un autre flic de l’époque, qui semble avoir très bien connu le style de travail de Puibaraud, mais sans partager son goût immodéré pour la manipulation, d’où son approche critique, essentielle comme doc historique sur cette époque.

            L’autre, c’est carrément le témoignage d’un anar à "double casquette", Jacot, qui semble bien avoir tenté de défendre et la cause et la mémoire de Vaillant, dans ses derniers moments connus, avant son internement à Bicêtre, définitif, apparemment, malgré l’avis des médecins…

            On comprend aisément pourquoi…

            https://tribunemlreypa.wordpress.com/2019/05/27/de-lanarchie-policiere-et-de-la-vie-intime-des-commissariats/

            Sur Andrieux, voir également :

            https://tribunemlreypa.wordpress.com/2019/05/28/manipulations-policieres-suite-lattentat-de-saint-germain-en-laye-1881/

            Luniterre

            Jacot fut également emprisonné "provisoirement" durant la brève détention de Vaillant, avant son exécution.

            Vaillant lui-même fut mis à l’isolement complet, avec cette consigne générale :

            « Il est interdit à tous les employés et gardiens de la prison d’adresser la parole, sous quelque prétexte que ce soit, au détenu 23 de la IVe division, ni d’essayer de satisfaire un sentiment de curiosité en s’approchant de cette cellule. Toute infraction à cette consigne sera punie de la révocation immédiate. ».

            Relevé dans les archives de la Santé par Pierre Montagnon, un ancien détenu politique d’extrême-droite, devenu depuis un historien reconnu, dans ses spécialités…

            Ce qui s’appelle le croisement des sources…!

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